Dossier TECS

Une TMF contre la SLA

Août 2020

Un espoir

Qu’est-ce que c’est ?

Le Microbiote intestinal, ou flore intestinale, est l’ensemble des micro-organismes qui se trouvent dans nos intestins. Il est composé essentiellement de bactéries, mais peut contenir également d’autres micro-organismes. Ce Microbiote est particulièrement fragile, et l’usage des antibiotiques, tout comme les changements d’alimentation de ces dernières décennies, en ont réduit la diversité.

Pour étudier ce microbiote, il suffit d’analyser nos selles. En effet, celles-ci regroupent une partie de notre microbiote, éliminé avec les résidus d’aliments.

La transplantation de microbiote fécal (TMF), aussi appelée greffe fécale, consiste à administrer une préparation réalisée à partir de selles humaines d’un sujet sain à un patient atteint d’une pathologie qui est liée à une altération du microbiote intestinal, dans le but d’exercer des effets thérapeutiques.

En faisant cette transplantation, la personne malade reçoit l’ensemble des bonnes bactéries du donneur sain, lui permettant de repeupler son microbiote.

D’où viennent ces transplantations, histoire ?

La transplantation fécale, bien que remise à la mode récemment, est utilisée depuis le quatrième siècle en Chine. Elle est alors effectuée pour traiter des diarrhées d’origine infectieuses et des empoisonnements alimentaires.

C’est en 2013 que le traitement a, à nouveau, été remis sur la table, après la parution dans le New England Journal of Medicine d’une étude intitulée «Duodenal Infusion of DonorFeces for Recurrent Clostridium difficile».11

Alors que les premiers essais utilisaient encore un lavement rétrograde dans le gros intestin, l’étude de 2013 a introduit des matières fécales d’un donneur sain dans l’intestin grêle par voie antérograde (c.-à-d. par voie orale) via une sonde nasale.

Comment se passe une transplantation fécale ?

Pour le donneur, une série d’examens va permettre de vérifier que la personne n’a aucun risque de contaminer le receveur. Les selles sont alors prélevées sur place, dans le centre où a lieu la greffe, puis sont soit congelées pour une utilisation différée, soit utilisées dans les six heures, pour une greffe immédiate.

Pour le receveur, comme il s’agit de lui repeupler l’intestin, il est préférable de le débarrasser de son microbiote présent, par traitement antibiotique, ou par un lavement préalable.

11 Extrait de EMHMedia – SWISS MEDICAL FORUM – FORUM MÉDICAL SUISSE 2015;15(49):1147–1154

Plusieurs modes d’injection sont possibles :

  • Le tuyau nasogastrique passe par le nez et va dans l’estomac. L’inconvénient c’est qu’il nécessite la prise d’un anti acide juste avant la transplantation, afin d’éviter aux acides l’estomac d’anéantir certaines bactéries présentes dans le microbiote du donneur.
  • Le tuyau nasoduodénal va du nez au duodénum. Le duodénum est la première partie de l’intestin grêle. Les bactéries ne passent donc pas par l’estomac et ne sont pas attaquées par
    l’acidité stomacale.
  • La colonoscopie, comme la coloscopie, passe par l’anus, pour remonter dans l’intestin.
  • La méthode du lavement, qui permet d’insérer, comme pour un lavement, les selles diluées du donneur. Le tout se fait par gravité, avec une poche suspendue et un tuyau allant au rectum. Il faut alors retenir le liquide, pour que le microbiote se régénère avec celui du
    donneur.
  • Les gélules à avaler. C’est ce qui est le plus récent. Ces gélules sont protégées pour ne pas être attaquées par l’acidité gastrique et atteignent l’intestin sans être détruites.

Pour quelles maladies ?

Actuellement, ces transplantations de microbiote fécal ne sont pratiquées que pour une seule maladie, l’infection à Clostridium Difficile. Mais de nombreuses études sont en cours pour étudier l’impact de ces transplantations sur d’autres maladies, des maladies concernant entre autre le système digestif.

En effet, le rôle du microbiote ne se limite pas à l’intestin, mais il a un rôle fondamental sur l’ensemble du corps humain.

Il joue un rôle de rempart contre les micro-organismes pathogènes, aide à synthétiser les vitamines et oligo-éléments, à absorber certains nutriments, et renforce notre système immunitaire.

Les chercheurs estiment qu’un déséquilibre du microbiote intestinal peut entrainer le diabète, l’asthme, les allergies ainsi que les affections auto-immunes comme la maladie de Crohn, le lupus, le sclérose en plaques, etc. Cela peut aussi se traduire par une obésité et des troubles neurologiques ou psychiques comme l’autisme ou la dépression.

D’autres études sont actuellement en cours, pour les effets thérapeutiques dans le cas des maladies comme la sclérose en plaques, Alzheimer ou encore la maladie de Parkinson., comme illustrés par les articles sur les pages de la catégories Études de notre site.

Des risques ?

Les décharges demandées par les médecins pour ce soin dans d’autres pathologies disent :

Cette procédure de TMF est réalisée au plan international depuis plusieurs années et, si actuellement elle est considérée comme incapable de transmettre certaines maladies, ce risque ne peut être totalement exclu, qu’il s’agisse d’une maladie infectieuse ou d’une autre maladie. En ce sens, si les données scientifiques entourant les TMF, sont, dans l’état actuel de nos connaissances, parfaitement rassurantes, il n’est pas possible d’exclure un risque de complication infectieuse ou immunitaire.

Un article du journal « Le Monde » relate néanmoins un incident ayant entrainé un décès selon le New England Journal of Medicine (NEJM) le 30 octobre 2019. Des médecins américains détaillent les circonstances dans lesquelles une transplantation de microbiote fécal a entraîné une infection sévère par une bactérie multirésistante chez deux patients participant à un essai clinique. L’un d’eux
en est mort.

Depuis janvier 2019, la Food and Drug Administration (FDA) a formulé des recommandations exigeant que les selles des donneurs fassent l’objet d’un dépistage de micro-organismes multi résistants, notamment de E. coli productrices de BSLE. En juin 2019, la FDA a émis une alerte sur son site internet, demandant aux investigateurs cliniciens conduisant des études sous son égide de
réaliser désormais des examens de dépistage supplémentaires.

En France, depuis 2014, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament ainsi que la conférence de consensus européenne sur la TMF en pratique clinique recommandent la recherche de portage digestif de bactéries multi-résistantes chez tous les donneurs de microbiote fécal. Raison pour
laquelle, nous préconisons une étude encadrée.

Cet incident a permis d’élaborer un protocole plus exigeant.

Protocole intensif, résultats pérennes, c’est ainsi que le site BIOCODEX13 décrit le traitement de 18 enfants autistes âgés de 7 à 17 ans. Baptisé Microbial Transfer Therapy (MTT), le protocole consistait à faire se succéder deux semaines de traitement par vancomycine, un lavement intestinal, deux jours de TMF puis 7 à 8 semaines de TMF doublées d’un traitement anti-acide par oméprazole. À l’issue de ce premier essai de 18 semaines, les symptômes gastro-intestinaux étaient améliorés à 80 % et les symptômes autistiques légèrement moins importants (difficultés de communication, comportements répétitifs…). Ces bons résultats ont perduré deux ans plus tard : les troubles gastro-intestinaux étaient diminués de 58 % comparativement au début de l’étude. Mesurée par un professionnel, la sévérité de la maladie a nettement diminué : 83 % des enfants étaient considérés comme « autistes sévères » en début d’étude, contre 17 % à deux ans, 39% se situant dans la catégorie « léger à modéré », les 44 % restants étant passés en deçà des critères diagnostiques.