Témoignages

Je m’appelle Damien Perrier, 46 ans, marié et un enfant, docteur en physique, atteint de la sla depuis 2009. Je suis tétraplégique, aphone et constammentalité.

J’utilise un système de poursuite oculaire pour écrire sur mon ordinateur et communiquer. J’ai écrit et publié deux livres, le troisième est en cours de rédaction.

Avec mon ami Samuel Bernardet, ingénieur centralien, nous avons créé une association pour rendre la parole à ceux qui l’ont perdue. Elle se nomme EDICO pour Expérimentations de Diverses Interfaces Cerveau-Ordinateur.

Dans le cadre de notre association, nous menons plusieurs projets, dont notre projet phare, écrire par la pensée pour un malade alité (ce projet a reçu de nombreuses récompenses dont le prix Pierre Dumas 2017 remis à l’Institut de France par Catherine Bréchignac, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences et Xavier Darcos, chancelier ). Nos autres projets du moment sont l’utilisation du logiciel de communication ACAT de Stephen Hawkins grâce à un lever de sourcil, la communication grâce à une simple webcam, le contrôle de la domotique par différentes interfaces dont le lever d’un sourcil et la pensée.

Ce n’est pas parce qu’on est emprisonnés dans notre propre corps qu’on va rester inactifs face à la maladie de Charcot.

Alors, chacun fait ce qu’il sait faire dans son domaine de compétence pour aider la communauté sla. Moi, par exemple, je fais de la recherche pour permettre aux malades sla de communiquer. Pone réalise de la musique avec ses yeux. Gérard pilote son fauteuil roulant électrique grâce à ses yeux. Marie écrit des livres avec toujours sa touche d’humour bien à elle. Christian prête gratuitement du matériel aux malades sla. Virginie est à l’origine de ce dossier et travaille avec ses amis pour demander une autorisation temporaire d’utilisation à titre compassionnel. Je vous prie de bien vouloir m’excuser pour les malades sla et leurs proches que je n’ai pas cités, ils sont si nombreux.

Damien Perrier

Ils sont si nombreux.

14 novembre 2018 : Diagnostic de la maladie de Stephen Hawkings pour mon mari… Je me suis dit : bon il sera paralysé mais il peut vivre longtemps… J’ai compris rapidement que cela ne serait peut- être pas vrai. J’ai eu besoin de comprendre, le néant des médecins m’obsède… J’ai évidemment cherché sur internet, je me suis inscrite sur le groupe Facebook Sclérose Latérale Amyotrophique ou Maladie de Charcot – Maladies Orphelines, un groupe de 4201 membres.

J’ai demandé à une administratrice qui avait créé le groupe. Elle ne savait pas, elle a repris le flambeau d’un malade décédé (je lui exprime, à notre SLA inconnu, toute ma gratitude)… Oui, sur ce site, nous trouvons du soutien, des explications, des astuces… Mais aussi, et c’est le plus difficile à gérer, nous nous attachons aux personnes rencontrées, et chaque départ est un coup de poignard. La mort de Florence Descamps a été pour moi un moment très douloureux. Nous n’allons pas rester à regarder nos malades mourir à petits feux.

Dès le début de la maladie, j’avais lu des articles sur la transplantation de matière fécale. Je n’ai jamais réussi à poser la question à notre neurologue. Une fois, j’avais posé une question pour éclaircir ce que disait une malade, et sa réaction a été violente pour moi. Elle m’a inondée des pistes de cause de
la SLA en terme médicaux. J’ai compris en gros, mais mon mari rien…

Ces situations d’impuissance sont nombreuses, les incompréhensions peuvent tuer… Au début, je n’ai pas « forcé » mon mari à mettre sa VNI… Je n’avais pas compris que c’était juste vital…Heureusement, une infirmière a pris le temps de nous expliquer et de décoder les mots du médecin.

Quand Virginie a publié un article sur la possibilité de demander une autorisation, je lui ai proposé de se lancer. Elle a fait un sondage, et une centaine de malade ont répondu positivement à la question : Seriez-vous prêt à faire une TMF ? Sandrine et Karine étaient dans l’échange, nous semblions en phase, puis Gérard nous a rejointes pour nous apporter des conseils. Sandrine et Gérard ont créé des associations de soutien, leur expérience et leur réseau sont incroyables.

Cette expérience est unique. 5 personnes qui ne se connaissent pas, ne se voient pas, ne se parlent pas, lancent une opération de survie. Ils se promettent de n’engager des actions que si nous sommes tous d’accord. C’est sur cette base, que nous avons trouvé un nom, lancé la pétition, un groupe Facebook et le dossier que vous lisez.

Nous y mettons tous nos espoirs, et comptons sur votre soutien.

Pour Florence, soutenez-nous.

Hélène

Malheureusement les choses sont ainsi, et il faut faire avec.

Le plus difficile au début de la maladie n’a pas été le jour du diagnostic, mais bien avant.

J’étais partie pour parler de la manière dont me traitait mon mari, mais je me suis rendue compte qu’il avait raison, que j’avais beaucoup de colère en moi. Je lui en veux beaucoup pour ne pas affronter la maladie comme je l’aurais souhaité.

J’avais déjà des symptômes depuis le mois de mars, mais ni les examens, ni les spécialistes n’avaient pu me renseigner davantage, et l’ostéopathe m’avait conseillé d’attendre la fin des vacances d’été pour faire des examens supplémentaires.

C’est donc le jour de la rentrée que j’ai eu mon premier rendez-vous avec un neurologue, les symptômes s’étant aggravés pendant les vacances. Non seulement ce spécialiste m’a fait extrêmement mal, mais il m’a laissé repartir sans autres informations, me laissant même encore plus désemparée puisqu’il m’a dit alors : « effectivement il y a un problème, mais ça peut n’être rien, tout comme ça peut être très grave ».

Inutile de dire que le week-end qui a suivi a été horrible.

Loan, mon fils de 3ans, venait de commencer l’école. C’était sa première année, et il a dû sentir le stress ambiant. Sa première semaine a été catastrophique. Il n’était pas complètement propre à l’époque, et le stress, le changement, la fatigue font que le vendredi suivant, il se retenait d’uriner jusqu’à se faire du mal et ne plus arriver à uriner normalement. Nous avons eu très peur car il a fait une forte fièvre le samedi soir, et nous avons passé la nuit à l’hôpital.

Je crois que ça a été le pire moment de cette maladie, c’est là où j’ai vraiment pensé à l’avenir et à mon loulou. Avec David, mon mari, nous étions soudés et nous avons beaucoup pleuré. Bizarrement ça me rassurait de le voir partager ma peine. Ça a été de plus en plus rare par la suite car David ne supporte pas les pleurs. Ni les miens, ni ceux de Loan.

Comme je n’avais pas d’autre rendez-vous de prévu avec ce neurologue, au bout de 2 mois, les symptômes s’aggravant, je suis allée en voir une autre, réputée. Cette dernière ne s’est pas avancée sur le diagnostic, mais m’a recommandé à un de ses confrères, spécialiste de la maladie de Charcot.

Déjà là, je commençais à cibler un peu mieux ce dont j’étais atteinte, et bizarrement je me sentais moins inquiète, plus en mode ” combattante “.

J’ai rapidement eu le rendez-vous avec le neurologue. Et tout s’est enchaîné, examens et visites. Le diagnostic final a été plus long, mais quel soulagement de savoir ce que j’avais.

L’impression que j’ai eue en sortant, c’était que je me lançais dans un rude combat.

Je ne me suis jamais sentie perdue. Pour moi il s’agissait d’une épreuve, rien de plus. Et les pleurs ne sont qu’une manière d’évacuer un surplus de stress.
Le combat a commencé car j’en étais à un an depuis le début des symptômes. Le bras droit ne fonctionnait quasiment plus, et ma jambe droite commençait à boiter. Je continuais à donner des cours de peintures, mais cela devenait difficile pour moi de montrer comment faire. Et j’avais de plus en plus de mal à démarrer la voiture avec ma main droite paralysée.

Je marchais de plus en plus mal, et les chutes ont commencé l’été qui a suivi, une à Leucate en arrivant, puis d’autres, plus ou moins violentes, suivant que je tombais en avant ou en arrière.

Une fois je me suis éclaté le nez en voulant gronder Loan, sans faire attention à mon équilibre. Sans les bras pour me protéger, c’est le nez qui a pris, ainsi que les dents. J’étais en pleurs et Loan riait en me disant ” c’est bien fait ! “.

Cela devenait de plus en plus difficile de suivre Loan partout et plusieurs fois je me suis retrouvée par terre avec lui seul pour m’aider, mais du haut de ses 4 ans, il n’avait pas assez de force pour me relever. Il criait : ” vas-y maman, lève tes fesses ! “, mais je n’y arrivais plus.

Mais ma plus grande douleur, c’est celle du cœur. Chaque soir, je pensais à l’avenir, et je me disais que je ne verrais pas mon fils grandir. J’avais déjà tant de mal à le tenir dans mes bras !!

C’est à la rentrée suivante que je me suis intéressée aux appareils pour monter les escaliers. Nous habitions un troisième étage sans ascenseur. David a trouvé que je m’y prenais trop tôt.

Mais tout comme pour le dossier d’aides à domicile, je savais que les démarches prenaient du temps. Je m’étais occupée de tout pour l’instant, essayant d’anticiper pour éviter à David toutes les démarches administratives. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à trouver David un peu négatif vis à vis de la maladie. Il ronchonnait de plus en plus en rentrant du boulot, et quand je lui demandais de l’aide pour les démarches administratives, il freinait des deux pieds.

Mon auxiliaire, Poppy, m’aidait beaucoup pour adapter les outils (peinture et ordinateur) , lui semblait résigné : « à quoi bon ? Est-ce que c’est vraiment nécessaire ? » m’a-t-il demandé un jour, en parlant de l’eye mobile. Alors que j’étais toute heureuse de savoir que je pourrais continuer à communiquer.

Alors que je m’étais occupée de tout pour les travaux de la salle de bain (devis, visites , dossiers mdph et anah) , je commençais à être très fatiguée et j’aurais aimé avoir de l’aide de sa part. Mais il a laissé traîner.

J’ai vraiment commencé à me sentir seule.
Perdre le contrôle de mon corps a été très difficile, mais perdre la parole, plus dur encore.

Le passage au fauteuil roulant électrique s’est fait relativement sans douleur. Cela a même été un soulagement pour moi, car je commençais à craindre les chutes.

C’était pour moi un stress énorme, et la crainte de me casser quelque chose, qui me laisserait encore plus handicapée.

J’ai vraiment des moments de panique, que je ne contrôle pas quand je n’arrive pas à me faire comprendre. Je n’ai jamais été claustrophobe, mais je pense que la sensation est la même.

D’autant plus quand je suis dans une position qui me fait mal, et que je n’arrive pas à me faire comprendre. Et plus je panique, moins je suis compréhensible. Cela finit en crise de larmes et je deviens parfois agressive.

En mai 2016, je suis partie du domicile familial. D’une part, parce que les relations avec mon mari, étaient devenues compliquées, et aussi parce que je voulais les laisser tous les deux hors de la maladie. J’espérais que mon fils continuerait à venir me voir, mais je n’en avais aucune certitude.

Pourtant cet éloignement a fait du bien à tous. Mon fils a trouvé un équilibre entre le petit appartement avec jardin, que mes amies m’ont trouvé et mon mari s’est à nouveau, rapproché de moi.

Aujourd’hui j’en suis à sept ans après les premiers symptômes. Je ne peux plus bouger, ni parler, et je suis alimentée par gastrostomie.

Mon fils, même s’il s’est habitué à la maladie, ne cesse de dire que ça serait bien que je guérisse. Et moi, je garde espoir.

Karine

Je n’ai jamais été très à l’écoute de mon corps et il faut reconnaître qu’il n’a jamais été très exigeant. Une bonne grippe tous les 4 ou 5 ans pour m’obliger à rester alité deux jours de suite et la machine repartait.

Un jour, lors d’une petite balade, j’ai éprouvé très vite des difficultés pour avancer et j’ai préféré faire demi-tour.

J’en ai parlé à mon médecin qui m’a envoyé faire des tests à l’effort, mais au niveau cardiaque et pulmonaire, rien à signaler.

Petit à petit, je rencontrais des difficultés pour lever mes jambes plus qu’à l’habitude. Mais j’allais vers ma cinquante-septième année et pensais que l’âge était responsable de mes peines.

Ces difficultés revenaient de plus en plus souvent. Mon médecin me fit alors consulter un neurologue.

Celui-ci, après plus de quatre mois de rencontres sans réponses à m’apporter, me dirigea vers un service hospitalier spécialisé dans les maladies rares.

Faut dire qu’avec le temps, j’avais l’impression d’avoir des jambes d’une tonne quand je marchais.

Sans diagnostic formel, rendez-vous fut pris chez un « ponte » neurologue de Toulouse. Quatre mois d’attente si j’acceptais la consultation en « privé » avec dépassement d’honoraires.

Heureusement, mon médecin avait dans sa patientèle une kiné qui travaillait au centre sla, et qui, quand celle-ci lui parla de mes symptômes, me permit d’obtenir rapidement un rendez-vous avec le neuro de son service.

Et le diagnostic, brutal, est tombé. Je ne savais pas ce qu’était la maladie de Charcot, mais au moins je savais ce que j’avais et sans avoir conscience de ce qui allait m’arriver, je savais contre quoi j’allais me battre.

Le docteur m’a dit de ne pas chercher l’effort inutile, et même si au début j’ai eu du mal à m’y résigner, j’ai accepté de marcher avec des béquilles quand je sentais mon pas hésitant, d’utiliser un fauteuil si les distances étaient plus grandes, etc. Et je pense que ça m’a aidé à me préserver plus longtemps.

Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, j’ai essayé de me préparer à l’étape suivante. J’anticipais, cherchant à être prêt quand cela se poserait, même si, pendant ce temps, j’essayais de faire en sorte que ça n’arrive pas.

J’ai, bien sûr, écouté mes amis qui m’ont dit d’aller rencontrer tel radiesthésiste ou tel pseudo thérapeute, de faire ci ou ça, mais sans trop y croire. Et sans résultat non plus. Avec tout de même l’espoir de découvrir ce qui permettrait de vaincre cette foutue maladie.

Sachant que mes muscles allaient ne plus répondre à ma volonté, avec un ami on a créé des systèmes pour me donner plus d’autonomie, pour commander mon fauteuil à la voix, puis à l’œil. Etc. J’ai toujours cherché à préparer l’étape suivante, ça m’a permis de ne pas vivre dans le passé mais d’être dans le futur. Un futur que j’ai préparé et que je maîtrise tout de même encore un peu. C’est du moins le sentiment que j’ai.

Comme beaucoup, je pense, j’ai cherché sur internet, revu des cours de bio pour essayer de comprendre pourquoi des cellules meurent.

Je manque de potassium et le potassium, avec le sodium, permettent de nettoyer les cellules des éléments nécrosés qui les habitent. Mais c’est une explication peu convaincante. Et j’ai cherché
ailleurs sans plus de réponses valables.

Toujours autour de moi, on me parle de probiotiques, d’alimentation saine, mais sans me convaincre. Jusqu’au jour où Virginie m’a parlé des recherches qu’elle a faites et m’a fourni des études appuyant ses convictions.

Je reste quelqu’un de très pragmatique et ne fonce pas tête baissée n’importe où. Mais là, les quelques études menées m’incitent à dire qu’il n’est pas normal d’interdire aux malades atteints de SLA d’espérer aujourd’hui. Surtout lorsque l’on connaît le coût de revient de la TMF et le peu de risques qu’elle présente.

On nous dit, « rien ne prouve qu’il y aura un mieux », mais si rien n’est tenté, on continuera toujours de nous dire la même chose.

J’ai donc décidé de m’investir dans cette bataille, avec mes modestes moyens. Et j’espère que les malades les moins rares parmi les malades rares pourront enfin avoir un espoir. Non pas forcément celui de guérir (quoique), mais au moins celui de pouvoir essayer de faire changer leur futur.

J’ai demandé à l’ARSLA, qui pour moi est sensé nous soutenir. Mais là encore, même style de réponse.

Et j’ai appris que Sandrine, Hélène, Karine suivaient Virginie dans l’élaboration d’un dossier pour demander ce droit toujours refusé. Ce droit d’espérer. Ce droit de gérer notre avenir.

Et j’y crois.

Gérard

2010, l’année où tout va basculer à cause de trois lettres : SLA ; trois mots : Sclérose Latérale Amyotrophique ; un nom : Charcot.

Un mot que j’ai retenu quand la neurologue m’a annoncé la maladie au bout de huit mois d’angoisse, d’inquiétude, d’examens, d’hôpitaux, et une opération, pour retenir : Incurable.

J’avais 38 ans, j’avais des projets, des enfants à élever, et on vous dit « surtout n’allez pas sur internet vous informer ». On vous annonce votre mort et on vous dit de ne pas aller sur internet. Pourquoi me dire ça, alors que je ne sais rien de ce qui va attendre ?

Je n’étais plus dans le monde réel quand je suis sortie de son bureau. Je pensais à mes fils et mon mari, je voyais mes fils sans moi alors qu’ils avaient besoin de moi. Comme allaient-ils faire ? La route a été longue, très longue.

Je me souviens comme si c’était hier, d’être devant l’ordinateur et là je découvre une photo d’un homme, le visage sans expression, avec un tuyau dans son cou. J’ai de suite fermé la page. Le temps est passé, en une année j’avais perdu la capacité de me tenir debout et je ne pouvais plus prononcer les prénoms de mes trois fils.

Vous vous imaginez, vous, dans votre maison, vouloir appeler un de vos enfants et son prénom n’a plus aucun sens à la sortie. Puis le temps passe. Un enfant vient de se faire très mal, vous êtes là, votre fils vous réclame mais vous ne pouvez rien faire, juste hurler pour qu’on vous le donne sur vos genoux pour le consoler, mais non, on ne vous le donne pas, il faut que je me calme avant, mais ils n’ont pas compris que je ne hurle pas, mais tout simplement que je parle, je leur dis tout simplement de me le donner que j’allais le calmer. Mon fils est parti avec les pompiers, avec son frère de quatorze ans et son père. Vous savez la frustration d’être incomprise, se sentir inutile auprès des siens. Dix ans que je souffre et fait souffrir les miens.

Vous savez ce qu’elle nous fait subir cette putain de SLA loperie. Eh bien non, je serais bien curieuse de savoir si vous la connaissez. Parce qu’elle, on ne la connaît pas, que ce soit dans les hôpitaux, les soignants, les kinésithérapeutes et j’en passe. Je suis finalement allée voir sur internet, et je me suis fait beaucoup d’amis qui avait la SLA, j’ai créé mon association et j’ai réalisé des manifestations. J’ai perdu beaucoup d’amis qui comme moi, attendaient un traitement pour nous guérir. J’ai des amis qui sont partis en Suisse pour se faire euthanasier. Ils n’y croyaient plus et en avaient surtout marre de dépendre des autres.

Oui, je dépends des autres. J’ai eu mon mari pour le meilleur et pour le pire. J’étais la plus heureuse, on a fait des croisières avec mon handicap, on a fait du camping, on en a fait des choses pendant cinq ans puis un jour tout change, il devient agressif, puis violent. Je mets ça sur la fatigue. Et un beau jour, il m’annonce qu’il a quelqu’un d’autre. C’est le monde qui s’écroule à mes pieds surtout que cette femme, je la côtoie régulièrement, puisque c’était la femme de ménage. Je l’avais prise pour le soulager, je peux dire qu’elle l’a soulagé d’ailleurs, elle le soulage encore. Mais bon, tout ça pour dire que du jour au lendemain, je me suis retrouvée seule avec mes enfants et ma maman âgée de soixante-dix ans qui est venue vivre avec moi, sans savoir comment il fallait faire pour s’occuper de moi, sa fille invalide, devenue muette. Elle a dû tout apprendre, je l’ai épuisée, ma mère. J’ai dû me battre encore une fois pour avoir des aides humaines et puis m’occuper de mon divorce, de mes enfants.

Je me suis coupée du monde pour plusieurs raisons ainsi que de mes amis sla. Pourquoi je me suis coupée de mes amis sla ? Tout simplement parce qu’ils s’éteignaient. Chaque jour, un papillon s’envole. Et ça vous rappelle que vous aussi vous allez y passer.

Dix ans, je suis encore là. Je n’ai rien de plus que les autres, je n’ai eu droit à aucun essai clinique, j’ai même arrêté de m’intéresser à la recherche. Sauf qu’un jour, j’ai discuté avec Virginie et je me souviens lui avoir dit de faire attention à elle, parce ça fait mal de croire à quelques choses qui aboutira pas. Et aujourd’hui, nous voilà tous les cinq à croire en la transplantation de matière fécale, nous avons qu’à gagner en voulant essayer cette TMF qui peut nous faire que du bien. Et, pourquoi pas nous guérir.

La SLA est une grande famille qui est très unie, car nous savons faire face à des choses de la vie qui nous rendent plus forts, plus judicieux, plus combattants. Nous avons le droit d’avoir un traitement pour nous guérir. Nous voulons retrouver nos pouvoirs, pour embrasser, serrer nos enfants dans les bras, manger, respirer, danser, chanter et arrêter de dépendre des autres.

Je suis Sandrine Moro âgée de quarante-sept ans et maman de trois garçons.

Je suis fière d’être dans ce groupe de cinq combattants et je les remercie. Merci Virginie, Hélène, Karine et Gégé. On ne lâchera pas, on veut la TMF contre la SLA. Puisque rien ne vient à nous, on vient vers vous.

Sans les mains Le 08/08/2020

Sandrine

Je m’appelle Virginie, Frédéric est mon mari et nous avons deux enfants : Océane et Anouck. La SLA est entrée dans nos vies et les a bouleversées, il y a un peu plus de 4 ans. A l’aube de ses 31 ans, le 12 juillet 2016 lors de nos vacances d’été, mon mari était parti faire son footing et était revenu avec des fasciculations sur le bras droit. Ces fasciculations étaient présentes nuit et jour. Au début ça nous faisaient rire ces mouvements incessants, on ne savait pas pourquoi ils étaient là. On se disait : « peut être un manque de magnésium ? » Et puis en rentrant de nos congés fin juillet, un ami à nous a dit à mon conjoint : « j’ai l’impression que ton bras a maigri ». Nous prenons rendez-vous avec notre médecin traitant et nous tombons sur une jeune remplaçante qui nous oriente directement vers un neurologue. On s’inquiète un peu plus… et on rigole moins. Un jour de septembre, au travail lorsqu’il pratiquait son activité de mécanicien au garage où il était salarié, il n’arrivait plus à tenir un boulon avec sa main droite ; peu à peu sa main droite devenait incontrôlable et inerte… Le rendez-vous chez le neurologue tant attendu arrive et suite à une batterie d’examens, on nous dit qu’il est atteint certainement d’une maladie auto-immune, un syndrome Lewis et Sumner. Il a fait 3 mois consécutifs avec des hospitalisations qui ont duré 5 jours chacune pour faire des perfusions d’immunoglobuline, cela n’a malheureusement pas été efficace car le diagnostic posé n’était pas le bon. Il n’arrivait plus à écrire, ni à jouer avec ses enfants comme avant. Nous avions demandé à la neurologue qui le suivait à l’époque de transférer son dossier à l’hôpital. En mars 2017, après 2 mois d’attente nous nous rendons à l’hôpital afin que l’on fasse à mon mari un énième EMG (électromyogramme) et nous avons immédiatement compris ce qui nous attendait avec les explications du neurologue. Il nous dit que c’était certainement une maladie des motoneurones (nous savions déjà où il voulait en venir, nous connaissions ce langage) et qu’il fallait que mon mari revienne pour une hospitalisation et une ponction lombaire le plus rapidement possible, la semaine après le diagnostic était confirmé c’était bel et bien la SLA (sclérose latérale amyotrophique). Mon mari avait 31 ans… Le tout est, en plus de l’enclume que l’on prend sur la tête, de se demander comment expliquer ça a nos enfants qui sont très proches de leur père. Comment expliquer que le pilier de la famille va être amené à s’effondrer petit à petit sous nos yeux ? Que l’on ne pourra rien y faire, car il n’existe pas de traitement curable et que la seule chose à faire est l’acceptation de ce qui va inévitablement se produire : le décès de leur père dans les 3 à 5 ans (si l’on juge la moyenne). Nous avons expliqué cela avec nos mots en leur disant qu’on allait tout faire pour que cela n’arrive pas, car tout problème à sa solution si on cherche bien. Nous avons décidé de rester optimistes coûte que coûte !

De tout ça, je me suis mise à passer des heures entières à chercher le pourquoi, le comment, la solution possible via la lecture, internet et en discutant avec d’autres malades. Nous ne sommes pas dans le déni de la maladie mais dans le déni, oui, que la médecine « nous lâche » sans solution possible pour lui ! Ces médecins qui ont prêté serment d’Hippocrate ne peuvent pas nous dire que rien n’est envisageable pour mon mari. Mon mari a toujours eu des problèmes digestifs et je me suis, de ce fait, intéressée de très près à tout cela. Il apparaît que les troubles neurologiques et le microbiote sont intimement liés, vous pourrez le constater à la lecture de ce dossier. Mais ceci est un témoignage et je ne tiens pas à parler de ça mais de ce que nous vivons au quotidien. Mon mari a fait plusieurs chutes très importantes dont une qui marquera à jamais l’esprit de nos enfants. En août 2018, mon mari et mes filles ont souhaité m’offrir des fleurs pour notre anniversaire de mariage. Il a fait une chute très violente et s’est retrouvé avec une fracture ouverte à la tête. Et vous savez quoi, personne ne l’a aidé, les filles étaient en larmes et paniquées. Un couple était là, présent mais n’a rien fait… Ont-ils eu peur ? Mon mari éprouvant déjà quelques difficultés à marcher ont-ils pensé qu’il avait bu ? Comment peut-on laisser deux enfants et un homme dans de tels états sans rien faire ? Cette maladie fait-elle si peur ? Ma plus jeune fille a eu le réflexe d’aller sonner chez une amie à elle qui habitait tout près et là, ce fut la délivrance pour eux… A ce jour, nous aidons toutes les trois avec l’aide d’un auxiliaire de vie, un mari, un père, un employeur dans tous les actes de la vie quotidienne pour manger, s’habiller, se laver, aller aux toilettes même communiquer avec l’extérieur car cela devient compliqué… Il a 34 ans. Le seul argument que l’on me donne suite au refus de la greffe fécale en avril 2018 pour mon mari est : « manque de données scientifiques ». Si tel est encore le cas suite à la lecture de ce dossier, c’est qu’il vous faut le relire, car des données scientifiques il en existe bel et bien. Cette maladie est dévastatrice, elle ne laisse aucune chance, aucun traitement n’est disponible à ce jour. Le microbiote est une des solutions possibles pour tenter de freiner, stopper ou améliorer celle-ci et malheureusement c’est une piste trop peu explorée par le monde scientifique à l’heure actuelle. On nous dit qu’il faut rester sur des choses raisonnables car il faut jauger l’effet bénéfice/risque. Sincèrement avec la SLA, quel est le risque ? Que peut-on avoir de pire ? Lorsque la seule chose qui nous attend, c’est une condamnation à mort pour un crime qu’on a pas commis…

Virginie

Bonjour, Une envie de vous écrire à ce jour, de poser un peu de ma peine, un peu de colère, un peu d’espoirs… Je m’appelle Milène, j’ai 25 ans et il y a un peu plus de 6 mois, je vivais le plus beau jour de ma vie, la naissance de ma petite Giuliana, des rêves pleins la tête, de beaux projets à venir… Et puis ce petit doigt qui ne répondait plus tout à fait correctement en fin de grossesse s’est aggravé, la main a commencé à s’atrophier. Les RDV se sont enchaînés, les aller-retour à l’hôpital universitaire, et le diagnostic est tombé. « Vous êtes atteinte de SLA ». Je regardais mon petit ange à côté de moi dans ce cabinet en me disant que certainement je ne l’amènerais jamais à son premier jour d’école, qu’elle grandirait juste avec son père, et oublierait certainement mon souvenir.

C’est tellement injuste, mais je veux me battre, profiter de chaque petit instant, bonheur du quotidien.

Je vous lis depuis peu et ça me fait passer par tellement d’émotions, j’admire la force dont vous faites preuves, l’adaptation et toute cette bienveillance.

Merci à ceux qui prenne le temps de me lire, j’avais besoin de déposer quelque part.

Milène

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