Je n’ai jamais été très à l’écoute de mon corps et il faut reconnaître qu’il n’a jamais été très exigeant. Une bonne grippe tous les 4 ou 5 ans pour m’obliger à rester alité deux jours de suite et la machine repartait.
Un jour, lors d’une petite balade, j’ai éprouvé très vite des difficultés pour avancer et j’ai préféré faire demi-tour.
J’en ai parlé à mon médecin qui m’a envoyé faire des tests à l’effort, mais au niveau cardiaque et pulmonaire, rien à signaler.
Petit à petit, je rencontrais des difficultés pour lever mes jambes plus qu’à l’habitude. Mais j’allais vers ma cinquante-septième année et pensais que l’âge était responsable de mes peines.
Ces difficultés revenaient de plus en plus souvent. Mon médecin me fit alors consulter un neurologue.
Celui-ci, après plus de quatre mois de rencontres sans réponses à m’apporter, me dirigea vers un service hospitalier spécialisé dans les maladies rares.
Faut dire qu’avec le temps, j’avais l’impression d’avoir des jambes d’une tonne quand je marchais.
Sans diagnostic formel, rendez-vous fut pris chez un « ponte » neurologue de Toulouse. Quatre mois d’attente si j’acceptais la consultation en « privé » avec dépassement d’honoraires.
Heureusement, mon médecin avait dans sa patientèle une kiné qui travaillait au centre sla, et qui, quand celle-ci lui parla de mes symptômes, me permit d’obtenir rapidement un rendez-vous avec le neuro de son service.
Et le diagnostic, brutal, est tombé. Je ne savais pas ce qu’était la maladie de Charcot, mais au moins je savais ce que j’avais et sans avoir conscience de ce qui allait m’arriver, je savais contre quoi j’allais me battre.
Le docteur m’a dit de ne pas chercher l’effort inutile, et même si au début j’ai eu du mal à m’y résigner, j’ai accepté de marcher avec des béquilles quand je sentais mon pas hésitant, d’utiliser un fauteuil si les distances étaient plus grandes, etc. Et je pense que ça m’a aidé à me préserver plus longtemps.
Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, j’ai essayé de me préparer à l’étape suivante. J’anticipais, cherchant à être prêt quand cela se poserait, même si, pendant ce temps, j’essayais de faire en sorte que ça n’arrive pas.
J’ai, bien sûr, écouté mes amis qui m’ont dit d’aller rencontrer tel radiesthésiste ou tel pseudo thérapeute, de faire ci ou ça, mais sans trop y croire. Et sans résultat non plus. Avec tout de même l’espoir de découvrir ce qui permettrait de vaincre cette foutue maladie.
Sachant que mes muscles allaient ne plus répondre à ma volonté, avec un ami on a créé des systèmes pour me donner plus d’autonomie, pour commander mon fauteuil à la voix, puis à l’œil. Etc. J’ai toujours cherché à préparer l’étape suivante, ça m’a permis de ne pas vivre dans le passé mais d’être dans le futur. Un futur que j’ai préparé et que je maîtrise tout de même encore un peu. C’est du moins le sentiment que j’ai.
Comme beaucoup, je pense, j’ai cherché sur internet, revu des cours de bio pour essayer de comprendre pourquoi des cellules meurent.
Je manque de potassium et le potassium, avec le sodium, permettent de nettoyer les cellules des éléments nécrosés qui les habitent. Mais c’est une explication peu convaincante. Et j’ai cherché
ailleurs sans plus de réponses valables.
Toujours autour de moi, on me parle de probiotiques, d’alimentation saine, mais sans me convaincre. Jusqu’au jour où Virginie m’a parlé des recherches qu’elle a faites et m’a fourni des études appuyant ses convictions.
Je reste quelqu’un de très pragmatique et ne fonce pas tête baissée n’importe où. Mais là, les quelques études menées m’incitent à dire qu’il n’est pas normal d’interdire aux malades atteints de SLA d’espérer aujourd’hui. Surtout lorsque l’on connaît le coût de revient de la TMF et le peu de risques qu’elle présente.
On nous dit, « rien ne prouve qu’il y aura un mieux », mais si rien n’est tenté, on continuera toujours de nous dire la même chose.
J’ai donc décidé de m’investir dans cette bataille, avec mes modestes moyens. Et j’espère que les malades les moins rares parmi les malades rares pourront enfin avoir un espoir. Non pas forcément celui de guérir (quoique), mais au moins celui de pouvoir essayer de faire changer leur futur.
J’ai demandé à l’ARSLA, qui pour moi est sensé nous soutenir. Mais là encore, même style de réponse.
Et j’ai appris que Sandrine, Hélène, Karine suivaient Virginie dans l’élaboration d’un dossier pour demander ce droit toujours refusé. Ce droit d’espérer. Ce droit de gérer notre avenir.
Et j’y crois.